La surveillance post-commercialisation (PMS) n’est plus une formalité passive en vertu du Règlement de l’Union européenne sur les dispositifs médicaux (UE) 2017/745. Elle est devenue une attente réglementaire essentielle, qui exige des fabricants qu’ils surveillent en permanence les performances des dispositifs, qu’ils étudient et atténuent les risques, et qu’ils intègrent des données en situation réelle dans l’évaluation continue de la sécurité et des bénéfices cliniques. Le RDM de l’UE souligne que les fabricants doivent mettre en œuvre un processus de PMS proactif et systématisé pour s’assurer que les dispositifs médicaux restent conformes et sûrs une fois qu’ils sont sur le marché de l’UE.
Ce guide explore le PMS sous MDR en profondeur réglementaire et opérationnelle. Il clarifie les exigences légales, contraste les formats de reporting, examine l’intégration du PMS à l’évaluation clinique et à la gestion des risques, et met en évidence les défis et les meilleures pratiques pour maintenir la conformité à long terme.
Qu’est-ce que la surveillance post-commercialisation ?
La surveillance post-commercialisation fait référence au processus structuré et méthodique par lequel les fabricants surveillent les performances et la sécurité des dispositifs médicaux une fois qu’ils sont utilisés commercialement au sein de l’Union européenne. Il ne s’agit pas d’une collection réactive et passive de rapports d’incidents. Il s’agit d’un élément actif du système de gestion de la qualité (QMS) d’une entreprise qui s’aligne sur les principes ISO 13485 et ISO 14971.
Les objectifs principaux de PMS sont de vérifier la conformité continue aux exigences générales de sécurité et de performance (GSPR), d’identifier les risques émergents, de surveiller le profil bénéfice-risque et de détecter les tendances d’utilisation ou les schémas d’utilisation abusive. Les données obtenues par le biais de PMS informent également les améliorations de la conception du produit, les mises à jour des fichiers de risque et, potentiellement, la reclassification réglementaire.
Fondements juridiques : Articles 83 à 86 et Annexe III
La structure juridique du PMS dans le RDM est établie aux articles 83 à 86, ainsi qu’à l’annexe III. L’article 83 fixe l’obligation globale pour les fabricants de créer et de maintenir un système PMS adapté au type et à la classe de dispositif. L’article 84 stipule que ce système doit être documenté dans un plan PMS formel, qui fait partie de la documentation technique du dispositif. L’article 85 décrit les attentes spécifiques en matière de rapports pour les dispositifs de classe I, tandis que l’article 86 détaille les obligations du rapport périodique actualisé de sécurité (PSUR) pour tous les dispositifs de classe IIa, IIb et de classe III.
L’Annexe III spécifie le contenu et le format du Plan PMS et des documents de déclaration associés. Ensemble, ces dispositions définissent une norme minimale et définissent les attentes pour un système PMS traçable, réactif et aligné sur les risques.
Le plan PMS : Composants de base et considérations
Le plan PMS doit être plus qu’une liste de contrôle. Elle doit refléter une stratégie robuste et spécifique au dispositif pour collecter et analyser systématiquement les données post-commercialisation. Il doit également expliquer comment le fabricant identifiera les signaux, les performances des tendances, évaluera les réclamations sur le terrain et déterminera si et quand une mise à jour de la conception, de l’étiquetage ou des preuves cliniques est justifiée.
En plus d’une description de processus de haut niveau, le plan PMS doit identifier les types de données à collecter, telles que les rapports de service, les plaintes des clients, les événements indésirables, les données de registre et les revues de la littérature. Il doit décrire comment ces données seront évaluées, y compris les méthodes statistiques ou les seuils d’action, et comment les résultats du PMS seront répercutés sur la gestion des risques, le contrôle de la conception et l’évaluation clinique. Le cas échéant, le plan PMS doit également faire référence à un plan de suivi clinique post-commercialisation (PMCF) dédié.
Différencier les rapports PMS des PSUR
Dans le cadre du MDR, il existe deux principaux résultats du processus PMS : le rapport PMS et le rapport périodique actualisé de sécurité (PSUR). Les fabricants de dispositifs de classe I sont tenus de produire un rapport PMS. Ce document interne résume les résultats des activités de surveillance post-commercialisation et documente tout changement ou action corrective pris suite aux informations PMS. Bien qu’elle ne soit pas régulièrement soumise aux régulateurs, elle doit être facilement disponible pour inspection.
Un PSUR doit être préparé pour les dispositifs à haut risque, ceux de classe IIa, IIb ou III. Il s’agit d’un document plus détaillé et structuré, mis à jour tous les deux ans pour les dispositifs de classe IIa et annuellement pour les dispositifs de classe IIb et III. Les PSUR doivent inclure des données de PMS cumulées, des résumés des réclamations et des événements indésirables, des volumes de ventes, des estimations de l’utilisation de la population et une analyse mise à jour du rapport bénéfice/risque. Les PSUR pour les dispositifs de classe III et implantables doivent être soumis à l’organisme notifié via EUDAMED et feront l’objet d’un examen dans le cadre des obligations de surveillance.
Suivi clinique post-commercialisation (PMCF) : Générer des preuves en vie réelle
Le PMCF est une extension requise du PMS pour les dispositifs qui nécessitent une validation clinique supplémentaire après la mise sur le marché. Cela s’applique notamment aux dispositifs de classe III et implantables, mais peut également être pertinent pour les dispositifs avec de nouveaux matériaux, de nouveaux objectifs prévus ou des questions non résolues de l’évaluation clinique.
Un plan PMCF doit définir quelles données réelles seront recueillies, comment elles seront recueillies (par ex. registres, études observationnelles, enquêtes auprès des utilisateurs) et quels critères d’évaluation seront mesurés. Il doit également préciser les outils statistiques ou les méthodes d’analyse à utiliser. Les résultats des activités PMCF sont compilés dans le rapport d’évaluation PMCF, qui alimente directement le rapport d’évaluation clinique (CER), les mises à jour CER et le PSUR.
Sources de données et détection des signaux de sécurité
Les systèmes PMS efficaces ne reposent pas sur une source de données unique. Au lieu de cela, ils s’appuient sur plusieurs entrées pour former une image complète des performances de l’appareil. Ceux-ci comprennent, mais sans s’y limiter :
Rapports d’événements indésirables et mesures correctives de sécurité sur le terrain (FSCA), journaux d’entretien et de maintenance, bases de données de traitement des réclamations, dossiers de formation, registres cliniques, littérature scientifique publiée, audits internes et comparaison avec des dispositifs ou technologies similaires.
L’une des principales attentes est que le fabricant recueille non seulement ces données, mais les analyse activement à l’aide d’indicateurs, de seuils et d’outils de détection de signaux préétablis. La gestion des signaux doit être formalisée, avec des procédures pour trier, faire remonter et résoudre les signaux, et documenter toutes les conclusions et décisions.
Intégration avec les systèmes de risque et cliniques
Un système PMS fonctionnel est intégré au système de gestion de la qualité du fabricant. Les mises à jour des fichiers de gestion des risques en vertu de la norme ISO 14971 doivent refléter les nouveaux dangers ou modes de défaillance identifiés par le PMS. De même, les rapports d’évaluation clinique doivent être mis à jour avec de nouvelles données de sécurité d’emploi et de performance en situation réelle. Les modifications de conception et les mises à jour d’étiquetage proviennent souvent des résultats PMS et doivent être suivies via un contrôle formel des modifications.
Les fabricants doivent effectuer des examens transversaux réguliers des données PMS, impliquant des équipes des affaires réglementaires, cliniques, de gestion des risques et d’ingénierie. Cette vision holistique garantit que les résultats ne sont pas cloisonnés et que des mesures appropriées sont prises sur la base de preuves réelles.
Déficiences courantes en matière de PMS et comment les éviter
De nombreux systèmes PMS ne répondent pas aux normes MDR parce qu’ils sont trop génériques, ne sont pas adaptés à l’appareil spécifique ou dépendent excessivement de sources de données passives telles que les rapports de réclamation. Des plans de PMS inadéquats, des examens de données peu fréquents, des liens manquants avec la documentation sur les risques et la documentation clinique, et l’absence de méthodes analytiques prédéfinies sont fréquemment cités dans les audits et les inspections.
Pour éviter ces pièges, les fabricants doivent établir une propriété interne claire des activités PMS, allouer suffisamment de ressources et investir dans des outils numériques qui prennent en charge l’exploration de données, l’analyse statistique et la surveillance des tendances en temps réel. La documentation doit être complète, cohérente et immédiatement accessible pendant les audits réglementaires.
Mise en œuvre d’un système PMS proactif et efficace
La création d’un système PMS proactif nécessite une planification dédiée. Les fabricants doivent s’assurer que leurs plans PMS sont spécifiques au risque et au dispositif, régulièrement examinés et liés à chaque livrable réglementaire applicable. Un système PMS robuste est non seulement conforme, mais il réduit également les rappels de produits, améliore la satisfaction de l’utilisateur et informe le développement d’appareils de nouvelle génération.
Les fabricants doivent également planifier l’évolutivité. À mesure que les portefeuilles se développent ou que les produits mûrissent sur le marché, le système PMS doit évoluer pour inclure de nouvelles sources de données, des populations d’utilisation plus larges et des mécanismes de gestion des signaux plus complexes.
La surveillance post-commercialisation en tant qu’impératif réglementaire et stratégique
La surveillance post-commercialisation en vertu du RDM de l’UE n’est plus une tâche de conformité secondaire. Il s’agit d’une fonction stratégique qui relie les données cliniques, les évaluations des risques, les commentaires du marché et l’évolution de la conception. La capacité d’un fabricant à mettre en œuvre et à maintenir un système PMS robuste est une mesure clé de la maturité réglementaire, et de plus en plus, une source d’avantage concurrentiel.
Bien fait, le PMS devient plus qu’une exigence réglementaire. Il s’agit d’une boucle de rétroaction vivante qui permet aux fabricants de détecter les problèmes rapidement, de stimuler l’innovation des produits et de respecter les normes les plus élevées en matière de sécurité des patients et d’assurance des performances.